Les métiers de l’ingénieur
les secteurs et les domaines d’activités. Avec l’évolution rapide des
techniques et des technologies, notamment de l’information et de
la communication, la fonction et les métiers ont considérablement
évolué. Et cette évolution se poursuit. Face aux défis actuels, qu’ils
soient humains, environnementaux, techniques ou informatiques,
les ingénieurs possèdent, plus que jamais, un rôle important à jouer,
dans tous les domaines. Les points de vue des directeurs des trois écoles
d’ingénieurs du Groupe IONIS : l’EPITA, l’ESME Sudria et l’IPSA.
Bien que la définition même de l’ingénieur évolue, il existe cependant
un socle de compétences communes. Selon la Commission des titres
d’ingénieur (CTI), habilitée à conférer depuis 1934 le titre d’ingénieur
en France, « le métier de base de l’ingénieur consiste à poser et
résoudre de manière toujours plus performante des problèmes
souvent complexes, liés à la conception, à la réalisation et à la mise
en oeuvre, au sein d’une organisation compétitive, de produits, de
systèmes ou de services, éventuellement à leur financement et à leur
commercialisation. A ce titre un ingénieur doit posséder un ensemble
de savoirs techniques, économiques, sociaux et humains, reposant
sur une solide culture scientifique. »
De la technique au management
« La fonction d’ingénieur a considérablement évolué dans les quinze
dernières années, remarque Joël Courtois, directeur de l’EPITA. Nous
sommes passés d’un métier extrêmement technique à un métier multifacettes,
qui comprend aussi bien des éléments techniques, comme
par le passé, que des éléments de management, de marketing voire
de communication. On demande aujourd’hui à l’ingénieur de savoir
gérer un problème complexe dans un environnement international,
aussi bien d’un point de vue financier, marketing que technique. Il
doit donc se comporter comme un véritable chef d’entreprise, capable
d’imaginer des solutions, d’en tester la faisabilité, de les réaliser et
d’encadre leur intégration chez le client. Il doit savoir gérer des
éléments techniques, financiers, humains, des éléments de droit…
On ne sectorise plus les différentes facettes du métier d’ingénieur.
L’ingénieur doit être capable de donner son avis et de comprendre
les décisions. Les ingénieurs informatiques sont d’ailleurs très bien
placés pour occuper des postes de dirigeants, car ils sont spécialistes
d’un domaine qui impacte l’ensemble de l’entreprise et qui offre une
visibilité globale. »
Pour Roger Ceschi, directeur général de l’ESME Sudria, « la question
que l’on peut se poser est la suivante : dans quel secteur, dans quelle
activité, n’a-t-on pas besoin d’ingénieurs ? On ne peut imaginer le
monde d’aujourd’hui et de demain sans ingénieur. L’ingénieur se doit
d’imaginer l’avenir et depuis que l’homme recherche le meilleur pour
son espèce il n’a eu de cesse d’améliorer ses conditions de vie. On
pourrait citer de multiples domaines dans lesquels son investissement
a été décisif : santé, vie quotidienne, communication, transports,
énergie… Bref l’ingénieur construit le futur. »
Maillon indispensable de l’innovation
« De tout temps, un ingénieur a été celui qui doit trouver des
solutions originales à un problème concret, quel qu’il soit, explique
Hervé Renaudeau, directeur général de l’IPSA. Aujourd’hui, cela est
encore plus vrai, car l’innovation est la clé de survie des entreprises
dans un monde encore plus concurrentiel. Cette capacité à innover,
à trouver des solutions neuves et innovantes doit être encore plus
forte chez les ingénieurs. Les qualités attendues d’un ingénieur
sont au fond les mêmes entre hier et aujourd’hui, c’est finalement
l’environnement qui change. Nous évoluons dans un monde qui va
de plus en plus vite avec des nouvelles technologies et des évolutions
au niveau scientifique, technique, de l’environnement socioéconomique,
politique… Tout cela conduit l’ingénieur, comme par le
passé, à devoir faire de la veille, ce qui a toujours été une nécessité,
mais plus encore aujourd’hui, car on peut être très vite dépassé.
Il faut donc être à l’affût des changements et des innovations pour
trouver les meilleures solutions. »
« Pour la plupart des ingénieurs que nous formons, s’ils ne seront
pas des spécialistes dans tous les domaines, ce qui est impossible,
ils seront des femmes et des hommes capables de dialoguer avec ces
spécialistes de plusieurs secteurs, des scientifiques des différentes
disciplines, des responsables de production, des gestionnaires, des
commerciaux, des communicants, etc. Ils seront des managers
d’équipes, responsables projets dans tous les types d’entreprises,
petites et grandes, et d’administrations et leurs aptitudes en langue
anglaise leur permettront de se positionner sur tous les continents.
Leur spectre, large et diversifié par leur profil multidisciplinaire
en « Electrical Engineering », leur permettra de guider et d’animer
des équipes afin de créer des nouveaux produits, donc de la richesse
et des emplois et ainsi de favoriser le développement économique,
élément moteur de la civilisation. »
Quelle(s) formation(s) ?
Selon les critères d’évaluation de la CTI, les ingénieurs français suivent
une formation en cinq ans après le baccalauréat, leur permettant
d’acquérir une solide culture scientifique multidisciplinaire et une
spécialisation plus ou moins forte selon les cursus : « Dans tous les
cas, au moins 20 % du temps de formation est consacré à l’acquisition
de compétences professionnelles nécessaires aux entreprises :
conduite de projet, appréhension des aspects économiques et
financiers du métier d’ingénieur, niveau certifié en anglais. Tous les
élèves ingénieurs effectuent aussi un minimum de 28 semaines de
stage en entreprise et la plupart d’entre eux effectuent un semestre
de formation à l’étranger, soit en échange académique soit en stage
industriel. » Le titre d’ingénieur diplômé délivre automatiquement
à son titulaire le grade de Master, conforme aux standards
internationaux et en particulier à ceux de l’Union européenne.
« ces évolutions possèdent un grand impact sur la formation,
poursuit Joël Courtois. Auparavant, nous recherchions des profils
ouverts, curieux, qui s’intéressaient à de nombreux domaines et qui
avaient envie de s’immerger dans les technologies de l’information,
sachant qu’ils allaient appliquer leurs compétences technologiques
à des domaines très variés, en restant surtout dans la phase de
réalisation de projets et d’imagination de solutions. Aujourd’hui,
nous leur demandons en plus d’être des managers, de s’intéresser
à la gestion, au marketing, au droit, à la finance, aux ressources
humaines. Comme le profil de l’ingénieur évolue, il nous faut
désormais accueillir des jeunes prêts à prendre en compte ces
nouvelles dimensions. Bien sûr, on ne peut pas faire abstraction
de la dimension technique et scientifique, mais aujourd’hui, nos
promotions sont composées de diplômés qui savent conjuguer
passion et un profil généraliste. »
Pour Hervé Renaudeau, « nous devons nous adapter. Nous ne nous
pouvons ainsi plus nous contenter d’enseigner l’anglais de façon
traditionnelle comme c’était le cas il y a quelques années. Même si
un ingénieur a toujours dû parler anglais, aujourd’hui cela va plus
loin. L’ingénieur doit posséder une compréhension des cultures,
des différences, des approches des différentes populations. Cette
nécessité de devoir traiter avec un environnement multiculturel
est encore plus impérieuse. C’est pour cela que nos élèves passent
au minimum un semestre à l’étranger, pour découvrir une nouvelle
culture. Ils doivent expérimenter un nouvel environnement qui
dépasse le simple cadre des cours. »
« L’ingénieur a besoin de développer des compétences managériales,
car ses compétences technologiques ne sont pas toujours au coeur
de son métier dans l’entreprise et ne sont plus toujours suffisantes.
Le métier d’ingénieur est divers, poursuit Roger Ceschi. Pour autant,
dans certains secteurs, la demande en ingénieurs est très forte. C’est
le cas des secteurs des TIC, des transports, de l’énergie au sens de
la production, de la santé et des moyens dédiés au diagnostic, des
nanotechnologies, et bien d’autres dans lesquels la France a un
leadership ou pour le moins un certain niveau à conserver. »
présente une difficulté pour sensibiliser les plus jeunes aux carrières
offertes par un diplôme d’ingénieur. La France enregistre une
pénurie de candidats, comme le note Hervé Renaudeau : « Tout le
monde sait ce qu’est un avocat ou un médecin. Mais un ingénieur ?
C’est finalement une panoplie très large de métiers possibles.
Beaucoup de jeunes et un certain nombre de familles ont du mal à
définir ce qu’est la réalité de ce métier. C’est pour cela que nous avons
mis en place cette année, dans le cadre du Concours Advance, des
journées de découvertes du métier et de la formation d’ingénieur. »
D’après le directeur de l’EPITA, « le métier d’ingénieur, associé
pendant très longtemps à une composante très technique, a rendu
la place des femmes relativement minoritaire, avec un peu près de
25 % des ingénieurs. Dans le domaine des nouvelles technologies,
leur proportion tombe à 10 % ! Et cela pénalise le secteur, car les
applications et les produits développés sont essentiellement imaginés
par des hommes. Il y a une énorme demande des entreprises pour
des équipes mixtes. Ce phénomène de « rareté » est un atout pour
les ingénieures qui du coup possèdent une plus grande marge de
négociation en termes de salaires. »
La globalisation de l’environnement et des techniques a directement
impacté les métiers mêmes de l’ingénieur ainsi que la formation.
Aujourd’hui plus encore qu’hier, embrasser une carrière d’ingénieur
offre la possibilité d’évoluer dans les métiers et les secteurs les plus
divers. Selon le directeur général de l’IPSA, « un seul diplôme, celui
d’ingénieur, ouvre une palette extrêmement large de métiers, encore
plus large aujourd’hui que dans le passé. On trouve des ingénieurs
dans tous les domaines d’activités, y compris dans la finance.
Cela peut paraître un comble, mais la formation de l’ingénieur, sa
formation au raisonnement, sa capacité d’aborder les problèmes
avec un oeil neuf, lui permettent de s’adresser à d’autres secteurs
d’activités. Sa capacité d’adaptation fait partie de ses attributs.
On pourrait résumer la situation ainsi : l’ingénieur est passé du
statut d’homme des équations à celui d’homme de l’adéquation, qui
développe des solutions qui répondent à l’ensemble des contraintes. »