« Nous sommes dans un monde où il n’y a jamais eu autant de données »
Présent au mois de décembre 2018 pour animer une conférence spéciale autour du machine learning et l’intelligence artificielle (IA) devant les 1res et 2es années de l’EPITA Toulouse, Christophe Taillan, ingénieur développement segment sol au CNES (Centre national d’études spatiales), revient sur ce beau moment d’échanges.
Christophe Taillan
Pourquoi avoir accepté l’invitation de l’EPITA Toulouse ?
Christophe Taillan : C’est par une connaissance enseignant déjà au sein de l’école que j’ai appris que cette dernière cherchait de potentiels intervenants de différentes entités pour donner des conférences aux étudiants autour du thème de l’informatique. Ayant moi-même eu l’occasion de donner des cours par le passé, en tant que doctorant au sein de l’Université Paul Sabatier à Toulouse, j’ai trouvé l’initiative intéressante, d’autant que j’ai toujours aimé enseigner. Je me suis dit que cette conférence pouvait être une bonne occasion de parler de mon métier et de mes activités au sein du CNES, notamment autour du machine learning, un sujet plutôt tendance !
À quoi ressemble justement le quotidien d’un ingénieur développement segment sol au CNES ?
J’évolue dans un service dont une des missions est de mettre en valeur des données. Dans un projet spatial, on distingue segment spatial et segment sol. Ce dernier consiste à piloter les instruments en vol, mais aussi à traiter les données utiles qui sortent de ces satellites. Je me situe plutôt de ce côté-là. Ces données, nous les mettons à disposition des scientifiques ou autres utilisateurs. Je travaille notamment sur un projet qui s’appelle PEPS (pour « Plateforme d’Exploitation des Produits Sentinel ») et qui consiste à partager des données d’observation de la Terre de manière gratuite et publique. Cela demande une architecture informatique (matérielle et logicielle) particulière fonction des besoins utilisateurs. L’émergence de toutes ces données très volumineuses implique la mise à disposition de moyens de calculs conséquents et la maitrise d’outils et méthodes comme le machine learning.
En quoi l’essor du machine learning et de l’intelligence artificielle a pu révolutionner votre métier ?
Révolutionner n’est peut-être pas le mot adéquat. En effet, ces technologies sont connues depuis longtemps, notamment dans divers services du CNES, même si elles pouvaient porter d’autres noms par le passé. Pour autant, il est vrai que les termes « machine learning » et « IA » sont aujourd’hui sur le devant de la scène, par effet de mode mais aussi parce que ces derniers temps ont vu d’une part, une augmentation importante du nombre de données hétérogènes et d’autre part, une augmentation de la puissance de calcul permettant justement de traiter ces données. Finalement, mon métier a changé, dans le sens où j’ai dû m’intéresser à ces méthodes qui deviennent de plus en plus populaires. En particulier, une partie de mon travail porte dorénavant sur le fait d’accompagner différents projets et utilisateurs dans l’exploration de leurs données et de voir si des technologies comme le machine learning peut simplifier leur travail, en cherchant par exemple des anomalies ou des patterns dans les données.
Selon vous, est-ce que l’IA et le machine learning doivent devenir des sujets incontournables pour les futurs ingénieurs en école d’informatique ?
Je le pense, oui. Nous sommes dans un monde où il n’y a jamais eu autant de données, ne serait-ce qu’à travers les smartphones, Internet… Du coup, quand on tend à travailler plus tard dans l’informatique, il faut pouvoir être en mesure de comprendre cette manne en concevant des algorithmes pertinents. Car nous sommes aussi de plus en plus utilisateurs d’algorithmes sans le savoir – un bon exemple, c’est le tri automatique des spams dans votre boîte mail. Donc oui, même s’ils nécessitent de maîtriser un certain package informatique, les outils autour de l’IA et du machine learning sont très utiles. C’est pourquoi je pense que tous les étudiants en informatique devraient a minima s’y intéresser et comprendre les concepts, même s’ils n’ont pas vocation à se spécialiser sur le sujet.
Qu’avez-vous pensé des étudiants de l’EPITA Toulouse ?
La conférence a duré une bonne heure et je les ai trouvés très intéressés. Evidemment, pour les étudiants de 1re année présents, certaines équations ont pu paraître un peu complexes, mais j’ai senti que cela n’avait pas causé de soucis aux 2es années, qui ont pu ainsi faire le rapprochement avec certains des enseignements reçus à l’EPITA. Toutes les questions posées durant la rencontre ont, en tout cas, montré qu’ils avaient bien compris l’importance de ces technologies dans leur globalité. Et ça, ce ne peut être que positif.
Retrouvez l’article sur la conférence donnée par Christophe Taillan à l’EPITA Toulouse