Les projets de la promo 2019 – Voiture cartographe : une piste ingénieuse pour l’accessibilité
Chaque année, les étudiants de 5e année de l’EPITA dévoilent lors du Majeure Day leur projet de fin d’études (PFE) sur lequel ils ont passé plusieurs mois à travailler en équipe. Après Satefy View, l’école vous propose de découvrir une voiture cartographe développée dans le cadre de l’équipe de recherche SEAL par Axel Banal, Yann Bonnet et Antoine Lebeury (EPITA promo 2019) de la Majeure Génie Informatique des Systèmes Temps Réel et Embarqués (GISTRE). Un projet capable de mesurer les pentes et dévers des trottoirs pour aider les personnes à mobilité réduite à mieux savoir quels chemins emprunter.
Yann, Antoine et Axel
Quel est le principe de votre projet ?
Yann Bonnet : Le projet découle d’une problématique simple : en comparaison avec d’autres pays, la France a pas mal de retard sur la voirie. Quand une personne souhaite se rendre dans un restaurant à 300 m de là où elle se trouve sans avoir comment s’y rendre, elle va vouloir utiliser Google Map comme tout le monde. Mais si cette personne est à mobilité réduite et possède un fauteuil roulant, elle ne pourra pas savoir si le chemin proposé comprend une portion avec une pente trop élevée. Et pour cause : ce genre d’informations n’est pas indiqué sur Google Map. En effet, les trottoirs ne sont ni mesurés, ni cartographiés pour la simple et bonne raison qu’une telle démarche coûte assez cher. De ce fait, nous avons imaginé une solution alternative : plutôt que d’avoir des ingénieurs qui posent des bases au sol pour mesurer les coordonnées GPS et l’inclinaison d’une rue, nous utilisons un robot capable de faire le travail à leur place. Cela permet à tout le monde de réaliser cette tâche, y compris aux personnes à mobilité réduite – qui sont les personnes les plus concernées et travaillent bien souvent le plus sur le sujet.
Comment cela fonctionne ?
Yann : Notre voiture est équipée d’un gyroscope très précis, ce qui lui permet de mesurer l’inclinaison du trottoir ou de la chaussée, soit la pente et le dévers. Ces mesures sont synchronisées avec les coordonnées GPS, puis stockées et envoyées à une API de cartographie publique, Open Street Map. Elle fonctionne comme Google Map sauf que tout le monde peut y envoyer des données et en faire ce qu’on veut – comme créer des cartes personnalisées par exemple.
Quel a été le plus gros défi technique ?
Antoine Lebeury : Comme le projet concerne plusieurs choses différentes – un gyroscope, un GPS, etc. –, le défi consistait à faire fonctionner le tout ensemble, y compris des formats de données à la base absolument pas compatibles. Pour cela, nous avons utilisé ROS (pour « Robot Operating System »), un framework qui permet justement de récupérer des données de divers capteurs et de lancer différents logiciels pour les traiter et en faire quelque-chose. C’est le fait de mettre en place cela qui nous a posé le plus de problèmes et pris le plus de temps. Il fallait être en mesure de synchroniser et stocker les données afin de les envoyer sur l’API de cartographie.
Le projet utilise une voiture télécommandée customisée. Le choix du modèle a été important ?
Yann : Pas vraiment car le projet a été conçu en deux parties afin de justement permettre à tout le monde de réaliser des mesures sans avoir à se procurer une voiture télécommandée. En effet, il y a la partie capteurs, avec le GPS et le gyroscope, qui va faire les mesures, et la partie vecteur motorisé, qui peut concerner une voiture télécommandée, un fauteuil roulant et même, si la personne n’a pas de budget, une simple planche plate munie de roulettes.
Vos données sont-elles déjà présentes sur Open Street Map ?
Yann : Pas encore ! En effet, Open Street Map étant une communauté internationale où tout le monde peut rajouter des données, il faut d’abord suivre quelques lignes directrices et notamment dialoguer avec les modérateurs locaux pour parler des données, de leur intérêt, etc. C’est un processus qui prend du temps. De notre côté nous avons développé un logiciel fonctionnel permettant d’importer les datas mesurées sur Open Street Map.
Axel Banal : D’ailleurs, le PFE ne s’arrête pas là car il sera par la suite transmis aux étudiants de la promotion 2020 de GISTRE. Ils auront accès à toutes nos sources et tous nos documents et tutoriels. Cela leur permettra de se plonger dans le projet bien plus rapidement que nous. Les personnes extérieures à l’EPITA pourront aussi prochainement consulter nos travaux via GitHub.
Yann : Pour les étudiants, nous avons aussi réaliser un rapport complet et détaillé sur la problématique, les technologies utilisées, les choix réalisés, etc.
En plus de tout ça, vous avez également développé une interface de visualisation des données.
Axel : Oui. Il s’agissait au départ d’une option possible à ajouter au projet, mais suite à la présentation de notre projet lors de Journées Portes Ouvertes, on a vite compris qu’une telle interface allait être nécessaire pour permettre au plus grand nombre de comprendre ce qu’on faisait. Du fait, l’interface permet directement de voir les données récoltées et à quoi elles peuvent servir.
Enfin, quel est l’intérêt de choisir la Majeure GISTRE quand on étudie à l’EPITA ?
Axel : Selon moi, cette Majeure représente la meilleure continuité de la 3e année du cursus – soit la 1re du Cycle Ingénieur. En GISTRE, même si l’on se spécialise plus sur le système, on reste tout de même sur une approche généraliste de l’informatique. C’est donc une Majeure qui s’avère très intéressante pour ceux qui veulent se spécialiser dans le système et dans l’embarqué, mais aussi pour ceux qui ne savent pas encore quoi faire ou simplement prolonger les choses vues en 3e année.
Antoine : Je suis d’accord : en GISTRE, on fait beaucoup de pratique, de TP, etc. C’est aussi une Majeure qui permet de « taper » sur beaucoup de sujets différents, des systèmes très bas jusqu’à des sujets de haut-niveau comme de l’Internet of Things (IoT). Bref, un panel de choses très variées et très pratiques, concrètes.
Yann : Pour moi, la philosophie qui m’a poussé à aller en GISTRE, c’est que l’on ne peut pas utiliser un outil sans connaître ses mécanismes internes. Par exemple, si l’on a une horloge ou une montre, c’est toujours intéressant et pratique de savoir comment elle fonctionne si jamais elle connaît une panne un jour pour potentiellement la réparer soi-même. Avec les ordinateurs, c’est pareil : on travaille dessus chaque jour, on fait de la programmation, mais on ne sait pas toujours comment ces derniers marchent réellement. Comment le PC passe de l’étape où l’on appuie sur un bouton à l’étape qui permet de faire plusieurs choses dessus en même temps ? C’est cette curiosité qui m’a poussé à rejoindre cette Majeure. Pour autant, il n’y a pas que ça : lors de notre 1re année du Cycle Ingénieur, nous avons fait de la programmation sur des PC, mais nous n’avons pas fait de l’informatique sur ce qui n’est pas des ordinateurs – des voitures, des drones, l’IoT, des capteurs, etc. C’est une informatique différente qu’il est également très intéressant de découvrir. Peut-être que l’on ne travaillera pas forcément plus tard sur tel ou tel domaine, mais l’on aura au moins des connaissances de base en cas de problème ! Cela donne une vision globale de l’informatique.